Interview d’Adeline Champ, journaliste reporter radio pour La TRiBU.
La TRiBU est une radio associative créée en 2007 et diffusée sur le web et sur le 106.9 à Saint-Nazaire, en Loire-Atlantique. Elle offre aux 12-25 ans l’opportunité de réaliser et d’animer eux mêmes des programmes aux côtés de professionnels du métier.
Quelles sont tes responsabilités, en quoi consiste ton travail ?
Je suis journaliste reporter radio. Je suis salariée et j’ai une carte de presse. Mon métier c’est d’être sur le terrain et d’aller à la rencontre des gens. Parce que La TRiBU est une radio associative, j’ai également un BAFA et mes responsabilités incluent un volet animation : on travaille avec des collégiens et des lycéens qu’on emmène sur le terrain et qu’on accompagne dans la création de reportages radio.
Comment es-tu arrivée à ce poste ? Quel a été ton parcours ?
Contrairement à d’autres, je n’ai pas fait d’études de journalisme, ni d’école de radio, ce qui ne m’a pas empêchée d’obtenir ma carte de presse à 23 ans.
J’ai fait un DEA (diplôme équivalent Master 2) d’histoire au Mans. Je cherchais un petit boulot pour financer mes études et Ouest France recrutait justement des correspondants culturels, notamment en théâtre — ça tombait bien, j’en avais fait pendant treize ans. J’ai donc commencé avec une rubrique autour du théâtre, puis ça s’est élargit au fur et à mesure et j’ai pu couvrir des concerts, des expositions, et d’autres manifestations culturelles. Je continuais mes études à côté car je voulais être professeur d’Histoire-Géographie.
L’année de mon DEA, une chaine de télé locale qui s’appelait Canal 8 (aujourd’hui Le Mans Télévision) m’avait repérée et m’a embauchée pour faire quelques piges. En parallèle, je faisais de la radio associative pour les étudiants du Mans à Radio Alpa. Je suis devenue journaliste télé généraliste : je suis restée chez Canal 8 pendant deux ans, suivi de six ans chez France 3. Ensuite, je suis retournée à la radio en travaillant pour France Inter et Radio Fidélité, entre autres.
Et puis en 2008, pour les élections municipales, La TRiBU cherchait quelqu’un. Ils m’ont pris sur un remplacement à l’information et le contact avec les jeunes m’a tout de suite plu. Je me suis rendue compte que pour moi qui voulait être professeure, ce job était une symbiose deux mes deux passions : le journalisme et le professorat.
Ton pire job ?
De la téléprospection pour une banque. C’était en 1998 et je devais expliquer aux clients que les chèques allaient devenir payant avec l’arrivée de l’Euro et qu’ils devaient donc prendre ce produit bancaire pour ne pas payer …sauf que ce n’a jamais été le cas.
Le meilleur conseil qu’on t’ait donné ou la meilleure leçon que tu aies apprise ?
Ce serait Xavier Cossé, rédacteur en chef de France 3 Estuaire qui m’a dit : « Surtout ne change jamais. » J’ai refusé de faire quelque chose une fois à France 3 car c’était contre mes principes, et soudain on ne me faisait plus travailler. Xavier m’a fait confiance et m’a soutenue dans ma décision.
Il faut y aller. […] Ce n’est pas à 40 ans qu’on se lance dans la radio. De plus, ce sont des études très généralistes donc même si on change d’avis en cours de route, on peut toujours se réorienter.
Si tu devais te donner un conseil professionnel le jour de tes 25 ans ?
Mieux me vendre et avoir plus confiance en moi. J’étais un peu bonne élève, un peu naïve et je pensais que si on faisait bien son travail on aurait assurément une reconnaissance. Je me suis rendue compte avec le temps que c’est un métier de requins et que faire du bon travail ne suffit pas, il faut aussi dire que l’on fait bien son travail.
Un rêve professionnel qu’il te reste à réaliser ?
J’ai toujours été journaliste et j’aimerais bien un jour avoir un poste à responsabilité : rédactrice-en-chef, par exemple. À la TRiBU nous n’avons pas de ligne éditoriale à proprement parler, seulement des valeurs que l’on défend. Cela m’intéresserait vraiment de pouvoir développer une vraie stratégie éditoriale.
Un conseil pour les lecteurs et lectrices intéressé(e)s par cette voie ?
Y aller ! Il ne faut surtout pas s’arrêter au fait que ça peu être précaire ou difficile. Surtout s’ils sont jeunes, il faut y aller. S’ils ne le font pas maintenant ils ne le feront jamais : ce n’est pas à 40 ans qu’on se lance dans la radio. De plus, ce sont des études très généralistes donc même si on change d’avis en cours de route, on peut toujours se réorienter.
Quels sont les changements que tu aimerais voir dans ton secteur d’activité ? Comment pourrait-on innover ?
Ce que je vais dire est un peu généraliste, et c’était aussi vrai il y a dix ans, mais je pense qu’on est trop formatés. Je n’ai pas fait d’école de journalisme et ça a toujours été vu comme une tare, à part à France Inter et à La TRiBU où ça a plu. J’ai dû me battre contre cette idée que je n’étais pas capable de faire mon travail parce que je n’avais pas fait la même école que tout le monde.
Je trouve qu’en France on a du mal à sortir des chemins battus. Par exemple, ce n’est pas parce qu’on fait de l’information qu’on doit toujours être sérieux. L’information peut aussi être ludique ; elle peut aussi être récréative. On a encore du mal avec ce qui est différent.
C’est peut-être la précarité du métier qui veut ça mais j’ai l’impression que les gens n’osent pas assez.